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Pourquoi l’Iroquois ?

D’après : Les Civilisations des Indiens d'Amérique du Nord

Histoire et légende :

Les Iroquois ne sont pas un seul et même peuple. C’est une féderation de cinq peuples amérindiens qui vivaient près du lac Ontario dans l’Etat de New York. Le plus connu de ces peuples est celui des Mohawks qui assuraient la sécurité du territoire à l’Est, près du Canada. Les Senecas quant à eux assuraient ce même rôle à l’Ouest, près des chutes du Niagara. Entre les deux, les Onondagas régissaient la paix intérieure. Ces trois peuples étaient considérés comme les "vieux frères" du fait de leurs importantes actions militaires et politiques. Ils étaient liés aux Oneidas et aux Cayugas qui constituaient les "jeunes frères". Ensemble ils formaient une ligue quasiment invincible, ce qui assurait leur indépendance respective.

Mais cette cohésion n’a pas toujours été évidente. En 900 après J-C, lorsque les Iroquois descendirent des Apalaches de Pennsylvanie pour s’installer sur les berges fertiles du lac Ontario, chaque village était en perpétuel conflit avec les villages voisins : "Il y avait partout du danger, et partout des chants funèbres".

C’est à cette période troublée qu’une femme Seneca célibataire donna naissance à un garçon. Dans son rève, le Créateur lui annonça que son fils, Deganawida avait pour destin de planter le grand arbre de la paix. Sa grand-mère essaya en vain de le noyer, mais le bambin en ressortit indemne, ce qui l’aida par la suite à convaincre les Mohawks qu’il était bien un envoyé divin chargé d’apporter la paix. Il s’allia à ce peuple en la personne de Hiawatha, que le désespoir avait envahi après le meurtre de ses filles par une sorcière.

Avec le soutien de Hiawatha, Deganawida formula la "grande loi de la paix" qui devait mettre un terme aux guerres fratricides. Ils parcoururent le territoire pour faire connaître la loi et ne connurent de résistance que contre Thadodaho, chef et sorcier des Onongadas. Ils parvinrent pourtant à le rallier et le nommèrent à la tête des cinquante chefs de la toute nouvelle ligue iroquoise. Toutes les armes furent ensuite jetées dans une fosse et l’arbre de la paix fut planté par dessus, ce qui donna naissance à l’expression "enterrer la hache de guerre".

Cette loi régissait non seulement les relations intérieures, mais également celles avec les autres peuples qui étaient conviés à s’asseoir sous le grand arbre de la paix pour discuter. Les Tuscaroras, Iroquois chassés de Caroline du Nord, furent acceptés dans la ligue en 1722. D’autres peuples non Iroquois furent également adoptés et intégrés totalement.

La réputation de l’Iroquois :

Leur unité et la mise en commun de leurs forces conféraient aux Iroquois une influence politique et militaire indéniable sur la région et on leur a, à tort, associé la réputation d’être particulièrement cruels. En 1712 déjà, Jonathan Swift parlait de "Mohocks" pour désigner des désoeuvrés qui parcouraient Londres la nuit en agressant les passants. L’Iroquois, n’a donc pas attendu le XXe siècle et la culture punk pour devenir le symbole d’une population alternative.

En vérité, les expéditions militaires des Iroquois visaient principalement à conserver leur indépendance totale vis à vis de tous les peuples d’Amérique, qu’ils soient indiens ou colons.

Mais parallèlement les Iroquois incarnèrent également l’habileté diplomatique, le don du discours et l’opinion critique. Leur culture était tellement fascinante qu’ils firent des émules et trouvèrent des admirateurs parmi les personnes instruites. Aujourd’hui encore, les Iroquois marquent avant tout les esprits comme un exemple de société matriarcale et leur ligue reste un modèle qui a servi indirectement à l’élaboration de la constitution américaine. Benjamin Franklin déclara en envisageant l’union des colonies britanniques dès 1754, qu’il serait bien étrange que « six nations de sauvages incultes » soient parvenues à former une confédération solide et stable alors que la chose semble impossible pour une dizaine de colonies anglaises.

Une société atypique :

La constitution iroquoise n’avait cependant rien à voir avec ce que devait être celle des Américains. Le principe d’égalité politique n’était pas primordial pour les Iroquois. Les cinquante chefs de la ligue étaient désignés par les matronnes de chaque clan et leur nombre par tribu n’était pas proportionnel à la taille de chaque tribu. Par contre, le conseil de la ligue ne prenait jamais de décision à la majorité mais continuait de délibérer jusqu’à l’unanimité des participants. Les décisions prises n’étaient pas appliquées de force mais devaient être acceptées de plein gré par la population. Le fait que les chefs étaient désignés par des femmes, qui avaient également tout pouvoir de les démettre de leur fonctions s’ils se révélaient incompétents, témoigne bien que la société iroquoise était un matriarcat.

C’était cependant une forme de matriarcat unique, car il s’avère que les Iroquois étaient un modèle de société où les droits des deux sexes étaient équilibrés. Le pouvoir politique était partagé : les hommes dirigaient, mais ils étaient nommés par des femmes. Le pouvoir économique et social était également divisé : les hommes chassaient et nourissaient la tribu, les femmes possédaient leurs propres terres et leurs propres maisons et occupaient une place centrale dans le village.

Conclusion :

Le peuple iroquois n’a pas cessé de servir de sources d’inspiration puisque l’idée de matriarcat a été reprise au XIXe siècle par le mouvement féministe américain et puisque le mouvement pacifiste du XXe siècle s’est appuyé sur la grande loi de la paix des guerriers iroquois. De plus la crête "à l’Iroquois" (le "mohawk"), est devenu un symbole d’indépendance et de courage. Sans parler des punks, les parachutistes américain de la Seconde Guerre mondiale avaient adopté la crête pour signifier une filiation avec les Iroquois, car c’est un peuple qui n’a aucune notion de ce qu’est le vertige et la peur du vide.


Voir aussi : Tant que le soleil brillera...

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